Chemin
Au tout début dans ce ventre douillet,
Nul ne s’imagine qu’il devra gambader.
Extirpé, où suis-je, aveuglé par la lumière,
Je crie d’abord mon ressentiment de colère.
Mais que vois-je, un chemin.
Est-ce que je déroulerai son faste destin ?
Je rampe, je marche, je me tiens debout.
Toujours plus haut, toujours plus loin, sans jamais atteindre le bout.
Je grandis, je dévale sur un vélo, je prends le train, l’avion, je fais le tour du monde.
Je m’enrichis des autres, de ma liberté de penser, de la diversité et de la beauté, ces ondes fécondes.
Avec ce bâton à la main qui me soutient, je gravis le col de l’âge mûr.
J’en ai fait une épée aiguisée, bien pratique pour percer les murs.
Ce qui ne tue pas m’a grandi.
Et de tout le reste j’ai joui.
Le temps passe, je me pose, le sommet ne doit pas être loin.
L’ombre du crépuscule approche, j’ai eu beaucoup déjà et je ne désire plus rien.
Sauf tous ces mots qui resteront gravés dans mon cœur.
L’harmonie qui jaillissait de leurs riches couleurs.
Ils subsisteront après mon trépas.
Je peux donc vous dire adieu le chapeau bas.
Une dernière fois, mon regard embrasse la vallée, le sillon formé par ces pas ténus.
Maintenant je sais que je ne reviendrais plus.